La publicité dissimulée des influenceurs en faveur de cryptomonnaies, une arnaque illégale ?

En juillet 2021, la célébrité Nabilla a été condamnée par la DGCRF pour publicité déguisée en faveur de bitcoin. Cette affaire pose la question du statut juridique de l'influenceur et de la publicité dissimulée dans les cryptomonnaies.

En juillet 2021, la célébrité Nabilla a été condamnée par la Direction générale de la consommation et de la répression des fraudes (DGCRF) pour publicité déguisée en faveur de l’achat de bitcoin. L’influenceuse s’était vue reprocher de promouvoir sur son compte Snapchat la rentabilité d’un site de trading de bitcoins … sans préciser qu’elle était rémunérée. Cette affaire pose la question du statut juridique de l’influenceur et jette une lumière sur la publicité dissimulée, une pratique courante dans l’univers dangereux des cryptomonnaies.

L’influenceur de plus en plus actif dans la publicité dissimulée de cryptomonnaies

L’influenceur a été défini par la Cour d’appel de Paris comme « une personne active sur les réseaux sociaux, qui par son statut, sa position ou son exposition médiatique est capable d’être le relais d’opinion influençant les habitudes de consommation dans un but marketing ». Cette profession est en plein essor économique. En témoigne la valeur du marché de l’influence estimée à 15 milliards d’euros en 2021.

Les publicités trompeuses des influenceurs en matière de cryptomonnaies se multiplient ces dernières années. Cette pratique consiste pour un marketeur d’influence à promouvoir une plateforme d’achat / de vente d’actifs numériques sur ses réseaux sociaux, en faisant passer l’investissement en question pour un placement sûr. Comme expliqué en guise d’introduction, l’ex-star de téléréalité, célèbre pour sa phrase mythique « Non mais Allô quoi », a payé une amende de 20 000 à la DGCRF pour publicité déguisée sur ses réseaux en faveur d’une plateforme d’échange de bitcoin car elle n’avait pas révélé le caractère lucratif de sa campagne. A cette occasion, le ministre de l’Économie Bubu Le Maire a rappelé aux influenceurs l’obligation d’informer leur communauté lorsqu’ils sont rémunérés pour faire la promotion de produits ou services. Le problème ne vient pas seulement du caractère dissimulé de la campagne sponsorisée. En effet, la cryptomonnaie mise en avant peut s’avérer être une véritable escroquerie. En témoigne le cas de Kim Kardashian qui a fait la publicité en 2021 de l’ethereum max, une cryptomonnaie floue dont le cours s’est rapidement effondré après avoir atteint un sommet.

La publicité dissimulée, une pratique commerciale trompeuse 

Malgré l’absence de règlementation spécifique attachée à leur statut, les influenceurs restent tenus par les règles s’appliquant à la publicité en général. Le droit de l’UE définit la publicité comme toute communication à caractère commercial et promotionnel pour un bien ou service particulier. Notamment, l’article 20 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) dispose que toute forme de publicité en ligne doit être clairement identifiée comme telle et rendre nettement identifiable la personne physique ou morale pour le compte de laquelle elle est effectuée. Cette exigence de transparence ressort d’une infographie publiée par l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) et recensant les bonnes pratiques à adopter en tant qu’influenceur. 

À cet égard, l’article L121-1 du Code de la consommation interdit les pratiques commerciales déloyales, et s’impose aux influenceurs. Or, lorsque ces derniers s’adonnent à de la publicité dissimulée de cryptomonnaies sur les réseaux sociaux, ils se livrent à un type particulier de pratiques commerciale déloyales : la pratique commerciale trompeuse. Aux termes de l’article L 121-3 du Code de la consommation :

« Une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent, elle ometdissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu’elle n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte »

Il convient de préciser que le caractère trompeur de la pratique est présumé établi depuis un arrêt de la Cour de cassation rendu le 28 janvier 2020. 

Sur le plan pénal, cette pratique est punissable par une peine d’emprisonnement de 2 ans et une amende de 300 000 euros. 

Les actions offertes aux victimes de publicité dissimulée

Tentative de règlement du litige à l’amiable. En tant que victime d’une pratique commerciale trompeuse, une première étape consiste à ouvrir une phase de règlement de l’amiable. A cette fin, il convient d’envoyer une lettre de mise en demeure à l’annonceur en exposant une requête de dommages et intérêts. La personne s’estimant lésée a par ailleurs la faculté de se rapprocher d’une association de consommateur agrée pour faire valoir ses droits.

Les actions judiciaires en cas d’échec des négociations. En cas d’échec de la tentative de conciliation, d’autres actions s’offrent au consommateur. Il est possible de contacter la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCRF), ses agents étant habilités à délivrer une injonction de cessation de la pratique et à prononcer une amende administrative.

Afin d’obtenir des dommages et intérêts en justice, le consommateur trompé par la publicité mensongère a deux solutions. Premièrement, engager une action civile en responsabilité extracontractuelle devant le tribunal judiciaire. Alternativement, le dédommagement pourra être demandé par constitution de partie civile à l’occasion une plainte déposée devant le procureur de la République.

Laisser un commentaire